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Tatiana de Rosnay / Vif-Argent

« Je ne pourrais jamais écrire un roman où tout va bien. Un voisin insupportable, une guerre, une crue, une expropriation… Ce qui m’intéresse, c’est le grain de sable et surtout de savoir si l’on s’en sort bien. »

Dans une rue calme, à Paris, Tatiana de Rosnay nous reçoit dans son appartement sous les toits. Assise devant son bureau, elle aperçoit, au loin, la Tour Eiffel et les allers-retours de ses ascenseurs. « Je suis casanière, » avoue l’auteure de “Elle s’appelait Sarah”, “Boomerang” et “Manderley Forever”. « Ce n’est pas un hasard si la plupart de mes romans tournent autour de l’habitat : j’ai la chance de pouvoir travailler chez moi. » Ses gestes du quotidien sont liés à l’écriture, mais aussi à la lecture. « Je lis énormément ; deux ou trois livres par semaine. »

Hygiène de vie

Tatiana de Rosnay ne se nourrit pas uniquement de lecture. « Mon hygiène de vie ? » Elle réfléchit, l’œil pétillant. « Pendant au moins quinze ans, j’aurais pu virer dans le hardcore diététique. Mais j’ai eu la chance d’épouser un bon vivant, qui a fait pencher la balance d’un côté… Plus cool. » Et d’énumérer : « Chaque matin, je fais du yoga, je ne prends jamais l’ascenseur (elle habite au sixième étage), sauf quand je suis chargée, je m’entretiens ; de la marche, et je cours régulièrement sur les quais de la Seine. » L’écrivaine fourmille de projets. « Je partage mon temps entre la rédaction d’un roman écrit dans mes deux langues natales, une mission sur une série télé et enfin, un travail sur le scénario d’un film, qui sortira l’année prochaine et a un rapport avec Gustave Eiffel. » Ce dernier projet la réjouit d’autant plus qu’elle va y tenir un « vrai » rôle : trois jours de tournage sont prévus pour elle en mars.

Son dernier roman ?

Coédité par Robert Laffont et Héloïse d’Ormesson, « Les Fleurs de l’Ombre » promet des frissons : « J’ai voulu explorer comment le futur peut nous faire peur. Imaginer comment on peut être pris au piège des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle pour voir, finalement, où est notre place en tant qu’êtres humains. C’est l’histoire d’une personne avec trop d’imagination, qui emménage dans une maison trop connectée… »

Originalité : l’auteure a écrit son dernier roman en deux langues, l’anglais et le français, simultanément. « Quand je suis coincée sur un passage, je change de langue et ça me donne un nouveau souffle. Une traduction doit rester fidèle mais, moi, j’ai le droit de changer, de tout retravailler et d’adapter ! »

De sa mère British, Tatiana tient un sens de l’humour qui consiste à se moquer de soi plutôt que des autres. « Il y a quelques jours, dans la supérette du coin, une dame s’approche de moi et me dit : « C’est bien vous ? J’adore vos livres : je les ai tous lus ; Sarah, Boomerang, Rose… » Touchée, je la remercie sincèrement. À la caisse, derrière moi, elle soupire doucement : « Ah, si j’avais su que j’allais rencontrer Katherine Pancol… » Tatiana en rit encore.

CIGALE OU FOURMI ?

« On nous a dit que nous étions, mon mari et moi, des seniors – ce qui est vrai : nous avons 58 ans chacun. Nous avons consulté plusieurs organismes et mis tout à plat pour faire ce que nous devions pour l’avenir ; enfin, celui qui est prévisible. » Son secret anti- stress ? « Je me réfugie régulièrement dans une maison en Provence, près du Ventoux, où il n’y a pas de téléphone et où rien ne capte. Je m’installe sous un grand tilleul et là, je me sens très bien. »