Simple comme le slogan des publicités alimentaires que vous entendez régulièrement : « Pour votre santé, évitez de manger trop gras, trop sucré, trop salé… ». Frappée au coin du bon sens, cette invitation, lorsqu’elle est assortie d’une d’activité régulière, est la clef d’une bonne santé, d’un meilleur équilibre personnel et d’une longévité accrue. Mais en matière d’alimentation, le diable se cache souvent dans les détails. Entre les additifs – les bons et les mauvais – , les teneurs excessives en gras, en sucre et en sel, le consommateur est parfois pris au dépourvu. Avec les applis de notation alimentaire et le Nutri-Score, vous avez des indications fiables pour sélectionner vos produits et garnir votre assiette de manière saine, dans les détails. Les consommateurs contrôlent mieux leur alimentation tandis que les producteurs et distributeurs améliorent les compositions de leurs produits et recettes.
Voici comment.
Les outils d’une meilleure nutrition
Dans les allées d’un magasin alimentaire, un client dégaine son smartphone et photographie une plaquette de chocolat ou une barquette de jambon. Curieux manège ? Non, c’est devenu courant : les consommateurs utilisent de plus en plus souvent une application de notation pour contrôler les produits, avant de les mettre (ou non) dans leur panier. Objectif : manger plus sain, mais pas uniquement.
Les consommateurs veulent en savoir plus sur l’impact de leur nourriture sur leur santé. Le premier outil du genre s’appelle Yuka. Depuis son lancement avec son logo en forme de carotte, en 2017, son succès est fulgurant – l’application a été téléchargée plus de 14,5 millions de fois. Scanner le code-barres d’un article suffit pour voir apparaître sur votre écran ses qualités et défauts nutritionnels des produits, respectivement en vert et en rouge. Le verdict est clair : c’est trop gras, trop salé, peu sucré, à faible impact calorique, sans ou avec additif(s) et l’éventuelle nocivité de ces derniers. Et surtout, la note globale attribuée sur 100 (du vert au rouge en passant par l’orange), est devenue un véritable argument pour acheter ou passer son chemin. En toute logique, Yuka, qui revendique 700 000 produits alimentaires dans sa base de données, propose aussi des produits alternatifs mieux notés. Aujourd’hui, plus d’un tiers des consommateurs changent de marque si la notation d’un produit n’est pas conforme à leurs attentes (selon une étude réalisée par l’Ifop pour le spécialiste de la viande Charal). Face à un plat mal noté, ils ne sont plus que 19 % à acheter le produit quand même.
Quantité d’applis
Alors que le consommateur souhaite être davantage acteur de sa santé, les applications se multiplient.
Indépendant des industriels, Yuka teste les produits selon ses qualités nutritionnelles (avec pour référence le Nutriscore), la présence d’additifs et la dimension biologique des ingrédients. De son côté, l’enseigne U a lancé « Y’a quoi dedans ». La solution affiche les éventuelles substances controversées, les labels et autres certifications (bio, équitable…), et précise la valeur nutritionnelle (tant de calories, de glucides, etc.). Leur logique : c’est au consommateur de se faire une opinion sans être guidé par un score général. Avec l’appli « BuyOrNot », service de l’association de « boycott bienveillant » I-Buycott, l’analyse est poussée plus loin, en avançant un impact sociétal du produit. Ainsi, sont pointés les cas où une marque (ou son propriétaire) sont visés par des campagnes citoyennes, comme un producteur de soda pour sa gestion du plastique, un biscuitier pour son utilisation de l’huile de palme ou une maison de cafés pour sa politique d’optimisation fiscale. Dans ces cas, l’aspect nutritionnel d’un produit peut passer au second plan. Autre exemple, « C’est qui le patron ?! » (La marque du consommateur) prépare pour début 2020 l’appli « C’est quoi ce produit ?! ». Son originalité : la réponse sera fonction du niveau d’exigence de chacun concernant l’éthique, la nutrition, la qualité, l’environnement, le prix, l’origine et l’appréciation. Autrement dit, l’appli dira à chacun le niveau de compatibilité du produit en fonction de sa propre hiérarchie d’intérêts. La liste n’est pas terminée. L’Association nationale des industries alimentaires (Ania), le lobby du secteur, ambitionne de lancer sa propre solution, de même que « 60 millions de consommateurs », qui mijote « Mon assistant conso » avec des analyses nutritionnelles et toxicologiques à la clé.
Le réflexe de scanner
Scanner un produit devient un réflexe facile pour tâcher de consommer « mieux » : l’impact de ce geste devrait rapidement se faire sentir dans les rayons1. « Yuka contribue à ce que cette consommation plus éclairée de chacun fasse évoluer les choses et conduise les industriels à améliorer la composition de leurs produits », pose Julie Chapon, fondatrice de l’appli qui rebat les cartes de l’alimentaire.
Nicolas Chabanne, créateur de « C’est qui le patron ?! » abonde dans ce sens. « Le consommateur a besoin d’être rassuré et veut aussi, savoir où va son argent, par exemple ne pas acheter un produit qui pollue les océans. Maintenant qu’on a ces informations, on peut acheter mieux mais aussi, en signalant nos attentes, et impacter le marché. Voyez Intermarché, qui a changé 900 produits ! », se réjouit-il. De fait, l’enseigne des mousquetaires vise d’ici à décembre 2020 de retirer 140 additifs de ses produits maison.
Résultat : près de 900 recettes revues répondront mieux aux exigences des consommateurs. C’est qui le patron, maintenant ?
1. Les utilisateurs de Yuka déclarent à 94 % cesser d’acheter certains produits et 83% d’entre eux en achètent de meilleurs, selon une étude d’impact de Yuka après de 230 000 utilisateurs. (étude réalisée par courriel par le cabinet KIMSO du 25-29 avril 2019).
NUTRI-SCORE : la qualité de vos aliments en un coup d’œil
S’il ressemble au diagnostic de performance énergétique de l’immobilier, il s’applique pourtant à vos estomacs : le Nutri-Score est un outil graphique qui indique la performance nutritionnelle de vos aliments. Facilement repérable, il a été créé il y a deux ans pour informer et guider les consommateurs. Le moyen ? Un logo affiché sur les aliments et qui note leur qualité nutritionnelle, sur une échelle de « A » (bon) à « E » (mauvais) et en 5 couleurs. Du vert foncé (roulez !) à l’orange foncé (stop !), il est difficile de faire plus simple. Et le concept fait mouche auprès des consommateurs.
Comment le Nutri-Score est-il attribué ?
Le Nutri-Score prend en compte, pour 100 grammes de produit : les teneurs, d’une part, en nutriments et aliments à favoriser (fibres, protéines, fruits et légumes) ; et, d’autre part, en nutriments à limiter (énergie, acides gras saturés, sucres, sel).
Après calcul, le score obtenu par un produit permet de lui attribuer une lettre et une couleur. Tous les aliments transformés sont concernés par le Nutri-Score, exceptés les herbes aromatiques, thés, cafés, levures. Il inclut tous les breuvages, sauf les boissons alcoolisées. Notons aussi qu’il n’est pas applicable, faute de place, sur des produits au conditionnement présentant une surface inférieure à 25 cm². Vos barres chocolatées, par exemple…
Visible dans les rayons
« Le logo Nutri-Score répond à un besoin exprimé de la part des Français d’obtenir des informations nutritionnelles claires. Il est de plus en plus utilisé mais aussi mieux identifié par les utilisateurs », explique Santé publique France1. De fait, sa visibilité sur les lieux d’achat est en progression constante. Fin 2019, plus de 180 industriels et distributeurs affichent Nutri-Score sur leurs produits, un nombre qui augmente rapidement. La présence du logo a un impact réel sur le comportement des consommateurs.
Un quart d’entre eux affirme que le logo leur fait changer durablement certaines habitudes alimentaires. Comme choisir un produit avec un meilleur score au sein d’un même rayon ; limiter les achats de produits mal notés ou, enfin, changer de marque pour un même produit.
Pas assez vite, pas assez loin ?
Malgré tout, l’avancée du Nutri-Score en laisse certains sur leur faim. « Deux ans après son introduction officielle, l’étiquetage simplifié Nutri-Score n’est présent que sur 5% des produits vendus en grande distribution », souligne l’association UFC-Que Choisir, qui demande à ce qu’il soit rendu obligatoire au niveau européen. Car c’est bien là où le bât blesse : actuellement, le dispositif repose uniquement sur l’engagement volontaire des industriels et des distributeurs de l’alimentaire. « Si le Nutri-Score était affiché, les parents écarteraient beaucoup des aliments industriels destinés aux enfants », estime l’association2, qui précise, à titre d’exemple, que « la majorité des produits du petit déjeuner écopent d’un « D », soit le même score qu’un croissant au beurre ». L’aspiration à voir l’étiquetage nutritionnel devenir de rigueur trouve un écho favorable dans l’opinion publique. Selon Santé publique France, « près de 9 Français sur 10 se disent favorables à ce qu’il devienne obligatoire. » Inutile de compter les mains levées !