Faire son miel en préservant la nature

Faire son miel en préservant la nature

L’apiculture en amateur, pratiquée par plus de 30 000 passionnés en France, connaît un engouement croissant. Cette activité transforme les espaces urbains et ruraux en sanctuaires pour les abeilles, attirant des citadins curieux et des amoureux de la nature. Pour ces apiculteurs amateurs, la fascination pour le monde des abeilles s’accompagne souvent d’un désir de reconnexion avec la nature et de contribution à la préservation des pollinisateurs, faisant d’eux des acteurs de la protection de la biodiversité.

Marie-Christine Maury, éducatrice spécialisée et parisienne, a découvert l’apiculture pour en faire un outil pédagogique pour des adolescents ayant des difficultés de concentration. Elle enseigne maintenant au rucher de la Société Centrale d’Apiculture (SCA) à Paris, participant à des programmes éducatifs et thérapeutiques, notamment avec des réfugiés souffrant de traumatismes. L’apiculture devient ainsi un moyen de sensibiliser et de communiquer. « C’est une découverte à chaque ouverture de ruche », témoigne-t-elle, « un monde qui s’offre à vous et un spectacle apaisant. »

Même en amateur, l’apiculture ne s’improvise pas : elle requiert une formation, des connaissances théoriques, et un suivi régulier. Choisir un emplacement idéal pour les ruches est crucial, nécessitant un terrain ensoleillé, ombragé, et riche en ressources alimentaires. En milieu urbain, où les abeilles doivent être plus fréquemment nourries avec du sirop sucré, les apiculteurs sont encouragés à participer à des ruchers collectifs pour faciliter les soins nécessaires. « La présence d’arbres – les abeilles se nourrissent à 80 % de leurs fleurs – et d’eau – accessible car les abeilles ne savent pas nager – est essentielle », note Marie-Christine.

Le respect du rythme saisonnier et la régularité des inspections en pleine saison, du printemps à la fin de l’été, sont également déterminants pour assurer la survie des colonies.

Pierre Lucot a installé il y a vingt ans quatre ruches à proximité de sa maison rurale, en Anjou. Apiculteur amateur responsable, il met l’accent sur une pratique respectueuse, privilégiant l’observation sur la production de miel. « Je produis peu, environ 15 kg par ruche par an1 », dit-il, ajoutant qu’il aime avant tout « voir et savoir que les abeilles sont présentes, qu’elles pollinisent les arbres fruitiers en se nourrissant ». Pierre s’est fixé une conduite : « Ne pas être trop exigeant, rester calme et modeste face à la ruche. »

Récemment, Pierre a perdu deux essaims sur les quatre de son rucher. Il attribue cette perte au frelon asiatique, un prédateur importé redoutable. Malgré l’augmentation du nombre d’apiculteurs, les colonies d’abeilles diminuent en raison de menaces telles que la perte d’habitat, l’exposition aux pesticides, et la pression des parasites comme le varroa destructor2. Les pratiques agricoles intensives et le changement climatique contribuent également à la diminution de l’espèce, mettant en danger la pollinisation et la biodiversité.

Ainsi, la simple prise de conscience donne à l’apiculture tout son sens : les abeilles, essentielles à notre écosystème, représentent un monde complexe auquel nous appartenons.

1 – Les facteurs climatiques influent fortement sur les récoltes, d’une année sur l’autre. Le rendement moyen de miel par ruche est estimé à 23,5 kg de miel en 2022, niveau similaire à celui de 2021, amateurs et professionnels confondus. Mais les apiculteurs professionnels obtiennent des rendements plus élevés que les amateurs : les exploitants de plus de 400 ruches obtiennent une moyenne de 29 kg/ruche.
2 – Le varroa destructor est un acarien parasite qui infecte les abeilles et constitue l’une des principales menaces pour la santé des colonies d’abeilles dans le monde entier.