Jean Jouzel

Jean Jouzel, un grand scientifique au chevet de l’urgence climatique

« Les jeunes générations ont compris qu’il faut faire le maximum pour lutter contre le réchauffement climatique et s’adapter au changement, avec plus de solidarité entre les pays. »

Paléoclimatologue, Jean Jouzel l’un des dépositaires de l’histoire du climat, une discipline déterminante pour comprendre l’avenir de la planète. Cette histoire est encapsulée dans les glaces polaires, qu’il étudie depuis un demi-siècle. Tout commence en 1968, lorsque Jean Jouzel entre au CEA de Saclay, et y rencontre le glaciologue Claude Lorius qui lui propose de travailler avec son équipe.

Quelques années plus tard, le projet « Vostok » de forage profond des glaces d’Antarctique débute, auquel Jean Jouzel participe. Les résultats des forages, publiés en 1987, illustrent pour la première fois le lien qui existe entre effet de serre et réchauffement climatique. « C’est le début de la prise de conscience du réchauffement climatique accéléré au sein de la communauté des chercheurs. »

À partir de 2002, le chercheur s’investit dans le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), dont il deviendra le vice-président du groupe scientifique jusqu’en 2015. La publication du 4e rapport de l’institution, en 2007, dévoile au grand public le réchauffement climatique et ses causes. Dans la foulée, le GIEC reçoit le prix Nobel de la Paix. Entreprises, institutions et gouvernements se mobilisent et commencent à se fixer des objectifs.

Depuis, Jean Jouzel prend son bâton de pèlerin, expose et sensibilise sans relâche les citoyens et les décideurs mondiaux à la réalité et les conséquences du réchauffement. « Je crois que la plupart de nos concitoyens admettent que le climat se réchauffe. Après, la discussion est sur la réalité du rôle des activités humaines, malgré des arguments très étayés. »

En habitué de l’exercice, il démonte les critiques climatosceptiques. La plus courante : « Il y a d’autres problèmes à traiter avant le réchauffement climatique ». Riposte : « c’est faux, car le réchauffement climatique a un fort impact sur presque tous les problèmes qui nous affectent : pollution, ressources en eau, biodiversité, problèmes de santé… » Autre argument sceptique : « luttons d’abord contre la pauvreté, on s’occupera ensuite du réchauffement climatique ». « Pourtant, les premières victimes des catastrophes naturelles sont les plus vulnérables ; on ne peut pas dissocier le problème social et économique, du problème climatique » assure-t-il.

Enfin, Jean Jouzel s’insurge contre le mythe de « l’écologie réparatrice », qui laisse croire que lorsque les catastrophes se produiront, l’homme saura en prendre la mesure… « C’est inexact… Par exemple, l’élévation du niveau de la mer que l’on observe actuellement pourrait atteindre un mètre à la fin du siècle et, cela, personne ne saura l’arrêter. »

« Je suis d’un optimisme raisonné », révèle-t-il. « Mais ce qui me préoccupe aujourd’hui, c’est l’absence au niveau planétaire d’une véritable politique volontariste contre les facteurs de réchauffement climatique. »

LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE PAR L’ÉDUCATION
Jean Jouzel est aussi un passeur. Son but : partager le savoir. « La plupart des décideurs économiques et politiques ne comprennent toujours pas ce qu’est la transition écologique. » Alors, le chercheur s’engage. Il préside notamment un groupe de travail créé par le ministère de l’Enseignement supérieur : « l’objectif est que 100 % des étudiants, quelle que soit leur filière, en école et à l’université, comprend les enjeux de la transition écologique. »
Et de conclure : « L’éducation est le meilleur moyen d’accélérer les prises de conscience. »