Météo et santé

Météo et santé

MÉTÉO ET SANTÉ : TOUS AFFECTÉS PAR LE TEMPS QU’IL FAIT ?

Soleil au zénith ou temps maussade : qui n’a pas déjà constaté les effets de la météo sur son humeur, ses émotions ou sa forme physique ? Pour les personnes météo-sensibles, les changements de temps ou les transitions saisonnières peuvent réveiller des douleurs ou exacerber des symptômes existants. Migraine, asthme, troubles respiratoires et vasculaires, dépression hivernale… La liste des maux que la météo est susceptible d’amplifier est longue. Les études cliniques et la biométéorologie médicale, discipline mettant en relation variations météo et santé, s’attachent à éclaircir ce phénomène à l’origine de nombreux débats : quelle influence a vraiment le temps sur notre santé ?

Se sent-on vraiment mieux lorsque le soleil est de la partie ? Doit-on craindre l’arrivée de l’humidité lorsqu’on a des rhumatismes ? Pourquoi le foehn, vent chaud et sec, est-il redouté des migraineux ?
Ces questions illustrent l’intérêt que nous portons aux effets de la météo sur notre santé.
Dans son Traité des airs, des eaux et des lieux, Hippocrate, père de la médecine, se préoccupait déjà des effets du temps sur ses concitoyens. Malgré une prise en compte ancienne, la science s’est longtemps tenue éloignée de l’étude de cette relation particulière, qui a davantage fait le creuset de croyances populaires… En témoigne l’influence supposée de la pleine lune sur les accouchements, jamais prouvée scientifiquement.

TOUS MÉTÉO-SENSIBLES, À DES DEGRÉS DIVERS

Pression atmosphérique, pic de chaleur, froid soudain… Les variations météo viennent nous rappeler notre condition de « baromètres humains ». Notre relation à notre environnement nous rend naturellement météosensibles, c’est-à-dire voués à nous adapter au temps qu’il fait, avec des effets variables selon les individus. Un changement de temps peut passer inaperçu chez les uns, tandis qu’une transition saisonnière sera ressentie chez les autres. En somme, tout dépend du terrain de chacun : la météo-sensibilité s’expliquerait par des facteurs comme l’âge et certaines prédispositions comme une fragilité de la glande surrénale ou de la thyroïde. La dimension psychologique n’est pas non plus à exclure : « Si nous sommes tristes quand il pleut, c’est qu’il y a un lien », relève la psychologue clinicienne Johanna Rozenblum, en pointant du doigt notre tendance à valider des croyances auto-réalisatrices.

ENTRE MÉTÉO ET SANTÉ, TOUTE UNE SCIENCE

Ces trente dernières années, une discipline s’est emparée du sujet en proposant d’expliquer l’occurrence de certains phénomènes cliniques, à la lumière des variations de température et de pression, de la force des vents ou de l’hygrométrie. « Les travaux que nous menons en biométéorologie se concentrent sur des risques comme les températures extrêmes, les UV et les pollens, afin d’établir des mesures de prévention et des recommandations sanitaires à l’adresse du public », explique Jean-Claude Cohen, Coordinateur météo et santé à Météo France. Les bulletins d’informations des experts de Météo France contribuent à alimenter l’information sanitaire lorsqu’un événement à risque pour la santé – chaleur extrême, vague de froid, épisode venteux – se profile. Cette discipline fondée sur l’analyse statistique conduit ainsi à des collaborations avec les services hospitaliers, le Samu, Santé Publique France ou le Ministère de la Santé dans le cadre du Plan National Canicule.

LA MÉTÉO REND-ELLE MALADE ?

La météo est-elle pour autant source de pathologies, comme peuvent le suggérer la saisonnalité des épidémies de grippe ou les pics de fréquentation des urgences par forte chaleur ? Effet du vent sur la migraine, incidence de la pollution sur l’asthme, conditions orageuses et infarctus… Des liens existent, avec des risques épidémiologiques mis en évidence par diverses études. Ainsi, d’après le travail de chercheurs allemands1, une chute de 2,9 °C de la température hivernale peut augmenter le risque d’accident cérébral de 11 %. Sur l’influence du temps pluvieux sur les rhumatismes, suspectée depuis des siècles, une équipe de l’université de Manchester a levé un pan du voile : humidité, vent fort et basses pressions augmentent de 20 % les douleurs arthritiques2 activées, selon d’autres chercheurs, par des baro-récepteurs au sein des tendons et articulations. Toutefois, l’absence de consensus sur la plupart de ces phénomènes incite à la prudence, avertit le Dr. Jean-Sébastien Marx, responsable de la régulation du Samu de Paris : « Hormis pour des pathologies comme le mélanome, imputable à l’action du soleil, les rapports de causalité entre météo et santé ne sont pas validés scientifiquement. Cela dit, nous gardons bon espoir, en confrontant les données toujours plus fiables des prévisions météo à des études cliniques d’ampleur, de prouver ces liens qui nous paraissent évidents. »

1 – La Jena University Hospital de Thuringe, dont les résultats ont été publiés dans le Journal Européen d’Épidémiologie en juillet 2015.
2 – L’étude Cloudy With A Chance Of Pain a été réalisée en collectant durant 15 mois, via une appli, les données de 2 658 patients souffrant d’arthrite, fibromyalgie, migraines et douleurs neuropathiques. npj Digital Medecine, 2019.

DÉPRESSION SAISONNIÈRE : LUMIÈRE SUR LE BLUES HIVERNAL

Le trouble affectif saisonnier1 est un trouble dépressif que l’on attribue au déclin de la luminosité pendant la période hivernale. Outre un moral en berne, ses symptômes sont bien connus et se traduisent, selon les individus, par une consommation augmentée de sucres, un manque d’énergie, une hypersomnie, une irritabilité, des troubles de concentration, ou encore, une baisse de la libido.

Plusieurs facteurs sont mis en cause dans l’apparition de cette affection qui toucherait 1 personne sur 10, tous âges confondus. En premier lieu, la hausse de la production de mélatonine, qui participe à la mise en marche du sommeil et à la régulation de notre horloge biologique. Une trop forte concentration de cette hormone sécrétée par l’épiphyse entraînerait une fatigue excessive et provoquerait, par un dérèglement du rythme circadien, un « glissement » vers un état de veille plus tardif dans la journée. Des troubles de la thyroïde sont également soupçonnés, de même qu’une origine génétique chez certaines personnes. Pour contrer les effets de la dépression saisonnière sur notre humeur et nos comportements, la lumière est bénéfique à plus d’un titre. Comme le révèle une étude menée par des chercheurs anglais2, un temps d’exposition prolongé à la lumière extérieure exerce une influence positive sur les symptômes dépressifs et sur la qualité du sommeil. Même par temps couvert, une simple balade ou un jogging fournit un apport lumineux de 1 500 lux, avec un effet bénéfique sur le moral. En intérieur, « la luminothérapie agit comme un synchroniseur puissant des rythmes de l’organisme, avec une efficacité de 85 % », enchérit le Dr. Patrick Lemoine, psychiatre au CHU de Lyon. Sortir, bouger et chercher la lumière : des moyens à portée de main pour atténuer la déprime hivernale.

1 – Le Seasonal affective disorder a été mis en évidence par des chercheurs américains du National Institute of Mental Health en 1982.

La migraine, maladie météo-sensible

Parmi les facteurs incriminés : les variations de température les jours précédant une crise, les effets d’une baisse de la pression atmosphérique sur les sinus et l’oreille interne, les ondes électromagnétiques produites par les orages, les vents secs, suspectés de stimuler les points névralgiques autour du cou, mais aussi la pollution pour son action sur la dilatation des vaisseaux sanguins.

Touchant près de 20% de la population adulte3, la migraine est une des affections les plus météo-sensibles.

3 – D’après la Fédération française de neurologie.

Pluie et allergies : des effets ambivalents

Parce qu’elles limitent (temporairement) la dispersion des pollens, les pluies sont réputées bénéfiques aux personnes allergiques. Mais les fortes pluies semblent jouer un tout autre rôle, tempère une étude américaine parue dans la revue Environmental Science & Technology Letters en mai 2020.

Les orages ont au contraire tendance à fragmenter les pollens, donc à favoriser leur inhalation. Raison de plus pour rester à l’abri quand le ciel gronde.

Selon des mesures effectuées par des chercheurs américains en 2019.